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Des mythes alimentaires qui sabotent votre bien-être

L’alimentation est un des domaines où il y a le plus de dogmes et de règles qu’on ne doit surtout pas discuter. Pourtant, en science, dans toutes les sciences, la discussion, le doute, les opinions divergentes sont la norme et doivent être entretenus. En effet, le moteur de la science est le doute scientifique.

Je vous propose d’examiner certains des grands principes nutritionnels « immuables » avec une loupe… un peu différente.

Les gras saturés sont néfastes pour la santé cardiaque

On se fait dire que les gras saturés vont nous boucher les artères et qu’il faut les limiter à 10 % de notre apport calorique pour prévenir les maladies cardiaques. Le guide alimentaire canadien nous encourage donc à réduire les aliments riches en gras saturés comme le beurre (ou le ghee/beurre clarifié) et l’huile de coco au profit d’aliments et d’huiles riches en gras polyinsaturés comme les huiles de canola ou de soya.1

Pourtant la preuve que cela prévient les maladies cardiaques est loin d’être solide.

D’ailleurs, en 2017, Zoe Harcombe et ses collaborateurs ont publié une méta-analyse sur l’origine de ces recommandations. Ils n’ont pas trouvé de preuves suffisantes pour étayer ces affirmations.2

Une étude qui n’a pas donné les résultats prévus

Une des plus grosses études d’intervention faites sur le sujet a montré des effets perturbants. On a donné aux participants des huiles végétales et de la margarine pour remplacer les gras saturés, dans le but d’améliorer leur santé. Le « mauvais cholestérol » a bel et bien baissé, mais la mortalité a augmenté!3

D’autres études sur les gras

D’autres études ont également montré que de changer les gras saturés pour des huiles végétales polyinsaturées augmente la mortalité.4,5

En revanche, les études sur l’huile de coco (le gras le plus saturé que nous ayons en cuisine) montrent qu’elle a un effet neutre sur le « mauvais cholestérol » et bénéfique sur le bon HDL. Elle aide également à réduire les triglycérides (aussi impliqués dans la mauvaise santé métabolique et cardiaque).6

Plusieurs auteurs se sont penchés sur le sujet des gras.

La preuve qui sous-tend la recommandation de limiter les gras saturés n’est toujours pas concluante.7-9

D’ailleurs, en 2020, des nutritionnistes américains ont officiellement demandé que la limite de consommation des gras saturés soit retirée des guides alimentaires.10

Finalement, on découvre de plus en plus que même le fameux « mauvais cholestérol », le LDL, n’est pas aussi mauvais qu’on le dit. Ce n’est pas un facteur de risque important pour la santé cardiovasculaire.11

Les protéines animales sont cancérigènes

Les fameuses études qui « prouvent » que la viande rouge est dangereuse ne sont pas aussi fiables qu’on veut nous le faire croire. En effet, selon l’analyse de Wang et collaborateurs publiée dans le Journal of Clinical Epidemiology en 2024, la majorité de ces études ne sont pas significatives. Et parmi celles qui le sont, la plupart montrent que la viande rouge non transformée diminue la mortalité.12

Je pense que nous serons tous d’accord pour dire que les saucisses à hot dog et le bologne ne sont pas des aliments santé.

Il y a bien sûr des études qui semblent montrer un effet négatif de la viande rouge sur le cancer.13 Et les chiffres sont impressionnants, mais ils proviennent d’études d’observation qui sont très peu fiables.

Pour mieux comprendre ce qu’est une étude d’observation et pourquoi les résultats ne sont pas fiables, lisez mon article Épidémiologie: la crème solaire donne la gueule de bois!

Gros consommateurs de viande

Quand on compare les gros consommateurs de viande rouge avec ceux qui la restreignent, on ne trouve pas de différence significative, tant pour les cancers que pour les maladies cardiovasculaires.14 D’ailleurs, l’une des 5 zones bleues (zones identifiées dans le monde pour la longévité supérieure de leurs habitants) se trouve en Sardaigne, un endroit où la consommation de viande est élevée!

Question de cuisson

Je ne fais pas ici l’apologie du steak et du bacon. Si vous êtes un(e) adepte du Spa Eastman et de sa Cuisine Tonique™, vous êtes probablement au courant de l’effet des glycotoxines sur la santé et le développement de l’inflammation. En effet, l’un des risques de la viande rouge vient de son mode de cuisson.

La cuisson au BBQ et toutes les grillades sont sources de glycotoxines, dont des hydrocarbures polycycliques, c’est-à-dire que la partie grillée contient des goudrons. Ces derniers sont connus comme étant cancérigènes et pro-inflammatoires.15-17 De plus, parmi les glycotoxines produites, on retrouve des nitrosamines, dérivés des nitrites, qui sont aussi des cancérigènes potentiels.18-20

Question de qualité de la viande

Bien évidemment, l’aspect qualité est aussi très important. La viande industrielle est non seulement un désastre écologique et humain, mais elle produit des animaux malades. Les animaux d’élevage en parc d’engraissement sont nourris à l’aide d’une bouillie qui n’a rien à voir avec ce que la nature a prévu pour eux. Elle contient des médicaments (antibiotiques et hormones), des pesticides, des grains (maïs et soya riches en omégas 6), des gras supplémentaires (huile de palme) et même des protéines animales (malgré la vache folle). Avec tout ça, les animaux survivent assez longtemps pour devenir suffisamment gros, et on les abat avant qu’ils ne deviennent trop malades et impropres (sic) à la consommation. C’est une calamité à tous les points de vue, sauf celui des actionnaires.21,22

Les animaux bio ou bien élevés, provenant de petits producteurs qui suivent les règles de Dame Nature, sont en meilleure santé, ne prennent pas d’hormones ni de médicaments et contiennent plus d’omégas 3 et de vitamine E.21 De plus, ce type de production a un effet net capteur de carbone et est donc très écologique.23,24

Plus de longévité

Finalement, en analysant les données de 175 populations, You et collaborateurs sont arrivés à la conclusion que la viande rouge est associée à plus de longévité, alors que les glucides (sucre et féculents) sont associés à l’inverse.25

Bref, encore ici, l’affirmation que la viande rouge est cancérigène, cause la maladie cardiaque et est pro-inflammatoire est plus une question d’opinion que de faits scientifiques. En plus de fournir des nutriments comme le fer et la vitamine B12, les viandes sont une source des acides aminés (protéines) les mieux assimilables et les plus complets, ce dont nous avons particulièrement besoin durant la croissance, la grossesse, ainsi qu’en vieillissant. À vous de décider ce que vous voulez manger et comment.

Vers une alimentation libre et éclairée

Les mythes alimentaires ont la couenne dure. Et comme la science est complexe et trop souvent imprécise, il est difficile d’y voir clair.

Le but de cet article est d’enlever les stigmates sur certains aliments. La sagesse millénaire devrait tenir autant de place dans notre jugement que la science.

Ainsi, des aliments qui ont permis à l’humanité de se développer, comme la viande et les sources de gras saturés, devraient occuper une place de choix dans notre alimentation.

Dans de prochains articles, je m’efforcerai d’apporter un doute sain aux glucides et aux grains comme base de l’alimentation, à l’importance du concept de calories, au rationnement du sel, et même à l’utilité des collations.

Cet article est signé par
Jean-Yves Dionne

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Références
  1. https://guide-alimentaire.canada.ca/fr/recommandations-en-matiere-dalimentation-saine/prenez-habitude-de-manger-legumes-fruits-grains-entiers-proteines/choisir-aliments-contenant-bons-gras/
  2. Harcombe Z, Baker JS, Davies B. Evidence from prospective cohort studies did not support the introduction of dietary fat guidelines in 1977 and 1983: a systematic review. Br J Sports Med. 2017 Dec;51(24):1737-1742. doi: 10.1136/bjsports-2016-096409. Epub 2016 Jun 29. PMID: 27357514. https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/27357514/
  3. Ramsden CE, Zamora D, Majchrzak-Hong S, et al. Re-evaluation of the traditional diet-heart hypothesis: analysis of recovered data from Minnesota Coronary Experiment (1968-73). BMJ. 2016 Apr 12;353:i1246. doi: 10.1136/bmj.i1246. PMID: 27071971; PMCID: PMC4836695. https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC4836695/
  4. DiNicolantonio JJ, O’Keefe JH. Omega-6 vegetable oils as a driver of coronary heart disease: the oxidized linoleic acid hypothesis. Open Heart. 2018 Sep 26;5(2):e000898. doi: 10.1136/openhrt-2018-000898. PMID: 30364556; PMCID: PMC6196963. https://openheart.bmj.com/content/5/2/e000898.long
  5. Ramsden CE, Zamora D, Leelarthaepin B, et al. Use of dietary linoleic acid for secondary prevention of coronary heart disease and death: evaluation of recovered data from the Sydney Diet Heart Study and updated meta-analysis. BMJ. 2013 Feb 4;346:e8707. doi: 10.1136/bmj.e8707. Erratum in: BMJ. 2013;346:f903. PMID: 23386268; PMCID: PMC4688426 https://www.bmj.com/content/346/bmj.e8707.long 
  6. Newport MT, Dayrit FM. Analysis of 26 Studies of the Impact of Coconut Oil on Lipid Parameters: Beyond Total and LDL Cholesterol. Nutrients. 2025 Jan 30;17(3):514. doi: 10.3390/nu17030514. PMID: 39940372; PMCID: PMC11819987. https://www.mdpi.com/2072-6643/17/3/514
  7. Astrup A, Dyerberg J, Elwood P, et al. The role of reducing intakes of saturated fat in the prevention of cardiovascular disease: where does the evidence stand in 2010? Am J Clin Nutr. 2011 Apr;93(4):684-8. Epub 2011 Jan 26. PubMed PMID: 21270379. https://ajcn.nutrition.org/article/S0002-9165(23)02179-2/fulltext
  8. Diamond DM, Alabdulgader AA, de Lorgeril M, et al. Dietary Recommendations for Familial Hypercholesterolaemia: an Evidence-Free Zone. BMJ Evid Based Med. 2021 Dec;26(6):295-301. doi: 10.1136/bmjebm-2020-111412. Epub 2020 Jul 5. PMID: 32631832; PMCID: PMC8639944. https://ebm.bmj.com/content/26/6/295.long
  9. Harcombe Z. US dietary guidelines: is saturated fat a nutrient of concern? Br J Sports Med. 2019 Nov;53(22):1393-1396. doi: 10.1136/bjsports-2018-099420. Epub 2018 Aug 14. PMID: 30108061. https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/30108061/
  10. Demasi M. US nutritionists call for dietary guideline limits on saturated fat intake to be lifted. BMJ. 2020 Oct 29;371:m4226. doi: 10.1136/bmj.m4226. PMID: 33122169.
  11. Ravnskov U, de Lorgeril M, Diamond DM, et al R. LDL-C does not cause cardiovascular disease: a comprehensive review of the current literature. Expert Rev Clin Pharmacol. 2018 Oct;11(10):959-970. doi: 10.1080/17512433.2018.1519391. PMID: 30198808. https://www.tandfonline.com/doi/full/10.1080/17512433.2018.1519391
  12. Wang Y, Pitre T, Wallach JD, et al. Grilling the data: application of specification curve analysis to red meat and all-cause mortality. J Clin Epidemiol. 2024 Feb 12;168:111278. doi: 10.1016/j.jclinepi.2024.111278. Epub ahead of print. PMID: 38354868. https://www.jclinepi.com/article/S0895-4356(24)00033-7/fulltext
  13. Huang Y, Cao D, Chen Z, et al. Red and processed meat consumption and cancer outcomes: Umbrella review. Food Chem. 2021 Sep 15;356:129697. doi: 10.1016/j.foodchem.2021.129697. Epub 2021 Mar 27. PMID: 33838606. https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0308814621007032
  14. Zeraatkar D, Johnston BC, Bartoszko J, et al. Effect of Lower Versus Higher Red Meat Intake on Cardiometabolic and Cancer Outcomes: A Systematic Review of Randomized Trials. Ann Intern Med. 2019 Nov 19;171(10):721-731. doi: 10.7326/M19-0622. Epub 2019 Oct 1. PMID: 31569236. https://www.acpjournals.org/doi/epdf/10.7326/M19-0622
  15. Lee JG, Kim SY, Moon JS, et al. Effects of grilling procedures on levels of polycyclic aromatic hydrocarbons in grilled meats. Food Chem. 2016 May 15;199:632-8. doi: 10.1016/j.foodchem.2015.12.017. Epub 2015 Dec 8. PMID: 26776018. https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/26776018/
  16. Domingo JL, Nadal M. Carcinogenicity of consumption of red and processed meat: What about environmental contaminants? Environ Res. 2016 Feb;145:109-115. doi: 10.1016/j.envres.2015.11.031. PMID: 26656511. https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/26656511/
  17. Hamidi EN, Hajeb P, Selamat J, Abdull Razis AF. Polycyclic Aromatic Hydrocarbons (PAHs) and their Bioaccessibility in Meat: a Tool for Assessing Human Cancer Risk. Asian Pac J Cancer Prev. 2016;17(1):15-23. doi: 10.7314/apjcp.2016.17.1.15. PMID: 26838201. https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/26838201/
  18. Szterk A, Roszko M, Małek K, et al. Profiles and concentrations of heterocyclic aromatic amines formed in beef during various heat treatments depend on the time of ripening and muscle type. Meat Sci. 2012 Dec;92(4):587-95. doi: 10.1016/j.meatsci.2012.06.004. PMID: 22762996. https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/22762996/
  19. Gibis M, Kruwinnus M, Weiss J. Impact of different pan-frying conditions on the formation of heterocyclic aromatic amines and sensory quality in fried bacon. Food Chem. 2015 Feb 1;168:383-9. doi: 10.1016/j.foodchem.2014.07.074. Epub 2014 Jul 22. PMID: 25172724. https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/25172724/
  20. Karwowska M, Kononiuk A. Nitrates/Nitrites in Food-Risk for Nitrosative Stress and Benefits. Antioxidants (Basel). 2020 Mar 16;9(3):241. doi: 10.3390/antiox9030241. PMID: 32188080; PMCID: PMC7139399. https://www.mdpi.com/2076-3921/9/3/241
  21. Średnicka-Tober D, Barański M, Seal C, et al. Composition differences between organic and conventional meat: a systematic literature review and meta-analysis. Br J Nutr. 2016 Mar 28;115(6):994-1011. doi: 10.1017/S0007114515005073. Epub 2016 Feb 16. PMID: 26878675; PMCID: PMC4838835. https://www.cambridge.org/core/journals/british-journal-of-nutrition/article/composition-differences-between-organic-and-conventional-meat-a-systematic-literature-review-and-metaanalysis/B333BC0DD4B23193DDFA2273649AE0EE ou https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC4838835/
  22. https://michaelpollan.com/books/
  23. https://certifiedhumane.org/regenerative/
  24. https://21acres.org/blog/the-role-of-animals-on-a-regenerative-farm/
  25. You W, Henneberg R, Saniotis A, Ge Y, Henneberg M. Total Meat Intake is Associated with Life Expectancy: A Cross-Sectional Data Analysis of 175 Contemporary Populations. Int J Gen Med. 2022;15:1833-1851
    https://doi.org/10.2147/IJGM.S333004 https://www.dovepress.com/total-meat-intake-is-associated-with-life-expectancy-a-cross-sectional-peer-reviewed-fulltext-article-IJGM

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