Il y a une vingtaine d’années, lorsque je terminais ma maîtrise en psychoéducation, ma précieuse ancienne belle-maman nous avait offert à mon conjoint et moi un trois jours de formation en communication consciente avec le Groupe Conscientia.
En toute transparence, je l’avoue, y baignant déjà de par mon cheminement d’études, j’y allais un peu « sans attente »… Mais quelle révélation j’ai eue! Depuis, cette approche concrète et humaine habite avec sens mon quotidien et mes enseignements. Je me prête donc bien humblement ici à l’exercice de vous en partager quelques grandes lignes, avec cœur.
L’approche de la communication consciente
Comme ce serait simple d’avoir une recette magique qui nous permettrait de mieux comprendre ce qui se passe en soi et de communiquer harmonieusement avec n’importe quelle personne, aussi réfractaire paraisse-t-elle!
Il n’existe peut-être pas de méthode miracle de ce genre. Cependant, l’approche de la communication consciente [approche de la Communication non violente (CNV) de Rosenberg] nous propose une clé « presque passe-partout » nous permettant, entre autres, d’ouvrir de nombreuses portes relationnelles que l’on croyait pourtant bloquées.
Elle nous ramène à notre intention bienveillante sous-tendant notre désir de communication en soi et avec l’autre. Toute simple, mais riche en nuances, cette approche concrète nous invite à peaufiner cette clé, en conscience de soi et de l’autre, pour l’insérer efficacement dans sa vie personnelle et professionnelle.
« Communication consciente », « communication bienveillante » et « communication non-violente » sont tous des synonymes employés.
Plusieurs études attestent de l’efficacité et de la pertinence de cette approche prisée. Entre autres personnes chercheuses, Visakaviciute et Bandzeviciene (2019) soulignent d’ailleurs que la démarche de la communication consciente peut être un outil fort efficace au quotidien, puisqu’elle renforce significativement la sensibilité aux besoins et aux expériences de soi et des autres et qu’elle développe la capacité à verbaliser et à gérer de façon empathique le stress et les conflits.
Plusieurs milieux de travail y ont d’ailleurs recours pour maximiser un climat d’équipe bienveillant ou pour aborder des situations plus problématiques.
Quels leviers à la base de cette approche peuvent m’aider à mieux me comprendre, améliorer mes relations et assumer pleinement mon vécu avec bienveillance?
Le lien-clé entre nos sentiments et nos besoins
Un bel ami-collègue a un jour amené à ma conscience une nuance qui a changé beaucoup de choses à ma capacité à mieux me décoder et me gérer : « Chaque émotion/sentiment est toujours relié à un besoin sous-jacent plus profond en chacun de nous. Tatoue-toi ça à l’esprit! ».
L’émotion ou le sentiment vécu est l’indicateur, le signal, qu’un besoin en nous est comblé ou non.
Et lorsque nous sommes conscients.es de ce besoin, nous pouvons alors y répondre, ou le reproduire, plus facilement. Par exemple, si nous ressentons du stress, quel pourrait donc être le besoin non comblé sous-jacent? Un besoin de maîtrise? De sécurité? De recul? De repos?
L’identification de ce dernier me guide alors vers les actions à prendre pour retrouver mon centre.
Si nous nous sentons énergisés/emballés.es, quel pourrait être le besoin qui est déjà comblé? Un besoin de stimulation? De sens? De nouveauté? D’exercice?
Et quel est l’intérêt d’identifier ce besoin s’il est déjà comblé?
La communication consciente nous invite à nous intéresser tout autant à nos besoins comblés que non comblés. Cela nous aide à peaufiner notre connaissance de soi, à les reproduire consciemment ainsi qu’à les savourer avec gratitude (cette dernière étant très payante au niveau de la production de nos neurotransmetteurs de sérotonine et de dopamine, plus connus pour la régulation de l’humeur et du plaisir).
Des notions bien simples en apparence, mais tellement aidantes lorsqu’elles sont maîtrisées.
Ma réserve d’empathie pour moi et l’autre
Comme c’est facile de se soucier de son ami, de son collègue, de sa sœur, de ses parents ou de sa personne amoureuse et de comprendre leur point de vue lorsque nous allons bien et que les choses sont apaisées dans notre vie.
Ceci consiste toutefois en un tout autre défi lorsque nous-mêmes avons besoin de compréhension et de temps pour nous.
C’est un apprentissage de bien gérer au quotidien nos réserves d’empathie pour soi et pour l’autre et, surtout, de s’assurer qu’elles restent « à flot ».
Pour certaines personnes, il est plus facile de se centrer sur ce que l’autre vit, avec considération et ouverture, parfois même en s’oubliant.
Pour d’autres, il est plus aisé « de s’envoyer » à soi-même de la compréhension et de la douceur, de reconnaître que c’est humain d’avoir des hauts et des bas, que personne n’y échappe…
La communication consciente invite à cultiver cette capacité d’allier empathie vers moi et vers l’autre en même temps, et ce, tout en assumant la responsabilité de nos sentiments et besoins sans les projeter sur l’autre.
Chaque sentiment et besoin ne concernent que soi. Ce sont parfois nos interprétations et nos déclencheurs/blessures en soi qui nous font opter pour des « sentiments-besoins masqués » tels que « je me sens jugé.e », « j’ai besoin que TU me comprennes », etc.
Il est tellement humain d’avoir ce genre de réflexe de communication et d’échapper quelques « sentiments-besoins masqués » au fil de nos échanges. Pour semer un terreau relationnel bienveillant plus fertile avec l’autre, au lieu de dire « je me sens abandonné.e », que pourrais-je dire qui ne concerne que moi-même? «Je me sens seul.e? Déçu.e ? Triste? J’ai envie de présence?
C’est là où les termes bienveillance et conscience prennent beaucoup de sens et que nous y ressentons l’importance d’enrichir notre vocabulaire émotionnel.
La valse à deux en quatre étapes
Avez-vous déjà valsé?
De façon imagée, il serait possible de visualiser la communication consciente comme une danse : une valse où, lorsque nous sommes disposés à échanger, nous décodons mutuellement avec empathie les sentiments et besoins de chacun pour en arriver à une entente satisfaisante.
Contrairement aux mœurs entourant la valse, ce sont toutefois les deux personnes qui guident et échangent sur ce qu’elles vivent et ressentent. Parfois « on va chez l’autre personne » pour comprendre ce qu’elle vit, parfois « elle vient chez soi » pour décoder nos sentiments et nos besoins, et ainsi de suite. Le tout est effectué en ayant sincèrement à cœur de préserver la relation avec soi et l’autre.
Comme dans toutes danses, il y a quelques pas à apprendre et à pratiquer tout en essayant de rester sur ses pieds et non sur ceux de l’autre
Quatre étapes concrètes de la communication consciente nous guident vers des échanges plus simples et harmonieux.
- Une observation (avoir en conscience son intention bienveillante de communication) et un retour aux faits (sans interprétation ou jugement);
- L’identification et l’expression de notre émotion/sentiment ressenti et lié à la situation;
- L’identification et l’expression de notre besoin comblé ou non (en restant sensible à ce que cela occasionne chez l’autre en échange);
- La formulation d’une demande qui tend à combler ou continuer de combler si possible le besoin exprimé (mais qui n’est pas une exigence). Cette demande amène ensuite à valser en ouverture et considération avec le sentiment/besoin de l’autre et ainsi de suite.
Plusieurs groupes de formations dans le monde (dont au Québec) nourrissent l’apprentissage de la communication consciente et décortiquent de façon expérientielle la pratique de ces leviers clés exposés. Marshall Rosenberg, le père de la CNV, nous y invite d’ailleurs magnifiquement par le biais de plusieurs de ses ouvrages, dont par celui intitulé Les mots sont des fenêtres ou des murs.
Parce qu’une partie du vrai bonheur est de se sentir connecté.e à soi et aux autres, la communication consciente prend assise dans ce sincère désir d’y vivre des relations plus authentiques et nourries. Comme beaucoup d’habitudes et de processus d’apprentissage, elle s’acquiert seulement de façon plus organique avec une pratique quotidienne, et ce, en se rappelant avec humilité qu’il s’agit d’une expérience de peaufinement à renouveler à chaque petite comme grande expérience de vie qui nous traverse.
Bonne découverte, pratique et connexion, au rythme de ce qui vous interpelle, vers un mieux-être collectif…
*Cet article s’inscrit dans une démarche de sensibilisation éducative où seules quelques grandes lignes de cette belle approche y sont abordées. Il ne remplace pas un cheminement individualisé avec un professionnel de la relation d’aide.

Cet article est signé par
Jacinthe Leduc
M. Ps. Éd., professeur de psychologie, formatrice et auteure de la série vidéo BIEN ENSEMBLE ET AVEC SOI
En quête de cette connexion à soi et à l’autre?

Retraite d’un jour
Communication consciente : décodage sentiment-besoin chez soi et l’autre, avec bienveillance
Cet atelier propose de s’initier aux notions de base de l’approche de la communication consciente et de les expérimenter afin de les intégrer à notre quotidien ainsi que dans nos relations dans nos diverses sphères de vie.